Dinan : un kinésithérapeute et sa compagne condamnés pour escroqueries
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Publié le 22/03/2019
Par S.L
Un kiné de Dinan comparaissait jeudi 14 mars devant le tribunal de Saint-Malo pour escroquerie. Sa femme naturopathe a, elle, été jugée pour usurpation de titre ou de diplôme.
Un kinésithérapeute de Dinan (Côtes d’Armor) comparaissait jeudi 14 mars devant le tribunal de Saint-Malo pour escroquerie.
Sa femme naturopathe a, elle, été jugée pour usurpation de titre ou de diplôme. Des petits arrangements dénoncés par ses confrères, qui auraient coûté à la CPAM la bagatelle de 184 000 €.
Sur la porte de son cabinet, il n’y avait qu’une plaque : la sienne, « masseur-kinésithérapeute ostéopathe ».
Pour trouver celle de sa femme, censément naturopathe, l’agent assermenté de la CPAM venu faire son enquête a dû chercher dans la salle.
Quand il demande une séance de drainage lymphatique, ordonnance médicale en main, le kiné lui répond qu’il n’exerce plus la kinésithérapie « depuis huit ou neuf ans. »
Voilà une procédure pour escroquerie lancée sur la base de dénonciations anonymes de ses confrères.
« On balance cet homme et on veut rester anonymes. C’est discutable » déplore l’avocat du kiné, Me Stichelbaut.
Kinésithérapie ou ostéopathie ?
Le fait est que depuis 2013, le kiné facturait des séances de kinésithérapie alors qu’il avait pratiqué de l’ostéopathie. Or les séances d’ostéopathie n’amènent pas à un remboursement de la CPAM.
L’homme procédait également à la facturation d’actes fictifs et laissait sa femme naturopathe procéder à des actes censément prescrits par acte médical.
À plusieurs reprises, des patientes venues pour un drainage lympathique sur ordonnance ont été dirigées vers elle, qui se servait alors d’un appareil M6 destiné à réduire la cellulite.
Le couple ne voit pas où est le mal :
« Ça m’est arrivé d’aller chez le dentiste, la secrétaire me fait le panoramique dentaire et c’est le dentiste qui se fait rembourser. Pour nous c’était pareil. »
422 patients le samedi
Le temps de travail déclaré n’a fait qu’amplifier le doute de la CPAM : pour la seule année 2013, ce sont 240 jours déclarés travaillés avec une moyenne de 9h50 par jour. Le procureur ironise :
« À ce rythme-là, on a à peine le temps d’aller aux toilettes »
Pour 2013 et 2014, 477 patients ont été recensés dont pas moins de 422 le samedi. Des chiffres qui apparaissent aux yeux des magistrats « surréalistes. »
En cause également : des séances rallongées, pour « prendre le temps avec les patients », mais aussi… doublement facturées. Un non-sens pour la présidente du tribunal.
« Si vous voulez vraiment aider les gens, vous prenez le temps mais vous ne facturez qu’une séance ! »
Quand bien même il aurait facturé des doubles séances, l’homme déclare que « c’est toujours mieux que de prendre cinq patients sur la même plage horaire et de les laisser sur des machines. »
« La frontière est très mince »
Alors kiné ou ostéopathe ? « La frontière entre les deux est très mince » explique le prévenu, désormais ostéopathe à temps-plein. « Quand je prenais en charge le patient, même quand je pratiquais l’ostéopathie, j’ai toujours pratiqué un peu de kinésithérapie. »
Et puis ils ne seraient « pas les seuls ».
« Reconnaissons-le ! On a tous pensé à une petite expérience personnelle, on a tous un kiné qui fait un peu d’ostéopathie et qui fait en sorte qu’on soit remboursés. »
Seule pratique que l’avocat admet contestable : la facturation d’actes pratiqués en semaine sur la journée du samedi.
« C’est une mauvaise application de la convention mais ce n’est pas de l’escroquerie. »
Un préjudice estimé à 184 471 €
« On crie haro sur la fraude à la sécurité sociale, en parlant des arrêts de travail. Mais la première fraude, elle vient des professionnels. Ça, ça rend malade ! »
Le procureur de la République demande 6 mois de prison avec sursis et la confiscation des biens immobiliers du couple en gage de remboursement des dettes. Car le préjudice pour la CPAM est estimé à 184 471 €.
« On n’est pas des escrocs »
L’ancien kinésithérapeute, dont le cabinet ne désemplit pas à Dinan, a été condamné à 4 mois de prison avec sursis. Il a interdiction d’exercer la profession de masseur kinésithérapeute pendant 3 ans.
Le tribunal a ordonné la confiscation des biens. Sa femme a été condamnée à 2 mois de prison avec sursis.
« On n’est pas des escrocs » a clamé le couple. « On a toujours voulu aider les gens. »
S.L