Post de Olivier Dodier – Docteur en psychologie sociale et cognitive

Post de Olivier Dodier

Docteur en psychologie sociale et cognitive

On a pu lire dans certaines interventions médiatiques de personnalités engagées dans la lutte tout-à-fait nécessaire contre les violences faites aux enfants que les « faux souvenirs » étaient un mythe, ou pire, une théorie « pro-agresseur ». Brandir les faux souvenirs comme un réflexe à chaque révélation de violences vécues durant l’enfance (ou plus tard) est parfaitement idiot et ne correspond à aucune réalité statistique. Les contextes de formation de faux souvenirs sont généralement associés à des pratiques thérapeutiques, même si d’autres contextes très suggestifs peuvent exister (p.ex., certaines auditions de police ou gendarmerie).

Il n’existe pas de données de prévalence des faux souvenirs induits d’événements à portée traumatique, entiers et riches d’informations, mais leur existence est indéniable. Voici trois cas où des thérapeutes (ou personnes avec une prétention d’aide à autrui) ont induit des faux souvenirs de violences durant l’enfance.

Parmi elles se trouve un cas récent, concernant non pas un thérapeute, mais un prêtre. https://lnkd.in/erbrmRBx https://lnkd.in/eiRvwZZE https://lnkd.in/ej6dFjZq

Dans l’affaire du prêtre de la région lyonnaise, les témoignages sont édifiants : « Nous avons commencé une véritable psychanalyse remontant à ma petite enfance, voire aux générations antérieures en évoquant la rencontre entre mes parents. » « Ils ont commencé à suggérer que j’avais été conçue lors d’un viol conjugal, que mes blessures n’étaient pas causées par les agressions sexuelles subies mais plus jeune. Ils essayaient de me faire avoir des flashs des faits d’inceste. Ça m’a paru plausible »

 « Ce sont des abus qui ont lieu en groupe avec des adultes qui violent, torturent et commettent des meurtres sur des enfants, poursuit Catherine. On me dit que moi-même j’aurais été victime de ce genre de chose et y aurait contribué. » « Ils arrivent à trouver une faille derrière laquelle ils mettent une amnésie traumatique. »

Bien que rares, des travaux récents ont montré que de telles pratiques visant à retrouver des souvenirs de violences durant l’enfance pourraient concerner des centaines de milliers de personnes en France, et des millions aux états-unis. sources : https://lnkd.in/eU6DaYmY https://lnkd.in/eaakwz3W https://lnkd.in/eMJjkDHJ

 Si un thérapeute vous suggère que vous avez vécu de telles violences durant votre enfance alors que vous n’en avez aucun souvenir, ou bien alors que vous consultez pour toute autre chose : stoppez toute prise en charge avec.

Olivier Dodier
Source : LinkedIn

Supplément : quiconque considère les faux souvenirs comme une « théorie » raconte n’importe quoi et n’y connais pas grand chose. Les faux souvenirs représentent une série de phénomènes variés, avec des processus sous-jacents tout aussi variés (https://psycnet.apa.org/record/2018-19399-001). Ce n’est pas « pro-agresseur », ce n’est pas « anti-victime », ce n’est pas un outil, c’est un phénomène. Un phénomène qui concerne absolument tout le monde. Les faux souvenirs ne sont qu’une facette du fonctionnement ordinaire de la mémoire et lutter contre reviendrait à lutter contre le fait de respirer ou d’avoir chaud quand il fait 43° dehors. À bon entendeur !