Fédération Européenne des Centres de Recherche et d'Information sur le Sectarisme (FECRIS)
ONG à statut consultatif spécial du Conseil économique et social des Nations Unies depuis 2009
ONG à statut participatif auprès du Conseil de l’Europe depuis 2005
European Federation of Centers of Research and Information on Sectarism
Présentation
La FECRIS (Fédération Européenne des Centres de Recherche et d‘Information sur le Sectarisme) a été créée le 30/6/94 à Paris à la suite du Congrès international sur le Sectarisme, à Barcelone en 1993. Il s’agit d’une association à but non lucratif de droit français. Elle se déclare par l’art. 2 de ses statuts, neutre sur les plans politique, philosophique et religieux.
Ses objectifs sont :
Grouper les associations européennes représentatives concernées par les organisations contemporaines de type sectaire et totalitaire, légalement constituées ou non, dont les pratiques sont contraires à la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, à la Convention européenne de Sauvegarde des Droits de l’Homme, à la Convention internationale des Droits de l’Enfant, à la législation européenne et aux législations nationales.
- Représenter les associations membres devant les institutions européennes dans le cadre de leurs activités d’information et de défense des individus, des familles et des sociétés démocratiques contre les agissements d’organisations sectaires nuisibles.
- Alerter les instances et les institutions internationales en cas d’agissements délictueux en la matière.
- Participer à l’élaboration de l’Espace judiciaire européen en la matière
- Constituer un réseau d’informations international.
- Effectuer des recherches et des études en particulier juridiques, dans tout domaine pouvant faire l’objet de dérives sectaires.
Principes éthiques
Une des bases essentielles de réflexion et d’action des associations membres de la FECRIS est l’écoute des victimes d’agissements abusifs ou présumés tels. Les objectifs et les méthodes de recherches et d’analyse sont validés précisément par cette proximité des personnes directement concernées.
Les dérives sectaires ne sont pas des phénomènes statiques. Leurs manifestations sont évolutives. Nous basons notre argumentation sur des données vérifiées et actualisées.
Notre analyse se situe sur le plan comportemental. Il est impératif de résister aux pressions visant à déplacer la question des dérives sectaires sur le terrain des croyances et de la religion. Ce faux débat, basé sur une approche incomplète du problème, est incompatible avec une analyse scientifique.
Nous désignons comme secte ou gourou l’organisation ou l’individu qui fait commerce de croyances et de techniques comportementales déstructurantes et qui utilise la manipulation mentale comme outil.
Nos conclusions sont circonstanciées et prudentes. Elles prennent en compte les dols et les douleurs et destructurations des victimes et de leur famille.
Nous dénonçons l’embrigadement aveugle généré par certains systèmes de pensée et les conséquences graves qui en découlent pour nos structures familiales, sociales et démocratiques.
Cette base essentielle étant posée, les membres de la FECRIS s’engagent à coopérer selon les principes suivants :
Respect du pluralisme religieux, philosophique et politique ;
Objectivité et pragmatisme en tenant compte de la complexité des situations à traiter ;
Discrétion, respect du secret professionnel ;
Remise en cause permanente compte tenu du caractère évolutif du phénomène sectaire
La FECRIS a organisé un colloque européen à Paris, les 23 et 24 avril 1999, regroupant 250 participants représentant 17 pays. Les associations représentées ont produit une déclaration commune sur des mesures qui leur paraissent devoir être prises.
L’A F S I : Alerte Faux Souvenirs Induits est correspondante de la FECRIS depuis le Congrès de Bruxelles en Mars 2006.
Congrès de la FECRIS du 24 Mars 2014 sur les « Sectes et le faux débat des droits de l’homme » :
discours de Laurette Onkelinx – Ministre de la Santé
Monsieur le Président,
Cher André,
Mesdames et Messieurs,
Merci à la FECRIS de nous réunir autour d’un phénomène de société qui reste malheureusement d’une grande actualité.
La société dans laquelle nous vivons, avec ses crises économiques, ses crises de valeurs, ses violences, son individualisme forcené, ses incertitudes lancinantes face à la précarité, fragilise particulièrement les individus.
La société contemporaine peut désorienter et décevoir certains d’entre nous, en ne paraissant pas pouvoir apporter de réponses à ces problèmes apparemment insolubles.
C’est dans ce terrain propice aux inquiétudes et aux fragilités que se développent les mouvements sectaires.
Ces sectes, en touchant à l’irrationnel, en s’entourant de mystère, d’occultisme, de pratiques et de rites étranges ou au contraire, en adoptant un discours pseudo-scientifique, visent à attirer les personnes en demande de réponses au mal-être ou aux craintes qu’elles ressentent.
Parmi ces cibles se trouvent, en particulier, les personnes fragilisées par la maladie et qui peuvent se sentir perdues ou sans perspectives d’espoir face à celles-ci.
Des sectes, des gourous, des pseudo-guérisseurs, pseudo-thérapeutes ou pseudo-scientifiques – quel que soit le titre sous lequel ils dissimulent leurs activités dangereuses – manipulent et abusent alors de la faiblesse de ces proies faciles avec des conséquences parfois dramatiques.
Cela fait longtemps que je me bats contre les organisations sectaires nuisibles.
Il y a environs dix huit ans, alors Ministre de l’enseignement, j’avais lancé plusieurs campagnes de sensibilisation contre les sectes et notamment la campagne « Gourou, gare à toi » et lutté contre les « écoles de sectes » qui visaient à déscolariser les enfants en les embrigadant dans des institutions privées destinées à les fermer du monde extérieur.
Par la suite, Ministre de la Justice, j’ai fait voter des modifications du Code pénal visant à réprimer l’abus de l’état d’ignorance ou de la situation de faiblesse des personnes afin de pouvoir lutter plus facilement contre les sectes.
Nous avons aussi amélioré le fonctionnement de l’Observatoire belge en la matière, le Centre d’Information et d’Avis sur les organisations sectaires nuisibles.
Aujourd’hui, Ministre de la Santé publique, je perçois que c’est dans ce domaine, notamment, que les mouvements sectaires connaissent un très fort développement.
Ce sentiment est malheureusement confirmé par les spécialistes de la matière, dont le Centre d’Information et d’Avis sur les organisations sectaires nuisibles au niveau belge, ou la MIVILUDES en France, qui indique qu’actuellement, les dérives sectaires dans le domaine de la santé représentent près de 25 % de l’ensemble des signalements reçus.
C’est pour cette raison aussi que j’ai mis la protection du patient au centre de mes priorités sous cette législature.
Il faillait agir contre les « Dérapeutes » comme les désigne la MIVILUDES : ces personnes mal intentionnées ou irresponsables, qui profitent d’un vide juridique ou de la faiblesse de patients et qui peuvent causer un tort considérable à des personnes déjà fragilisées.
En ce sens, avec la Chambre des représentants, nous avons mis en place un cadre légal pour l’exercice de la psychothérapie, qui dresse des conditions strictes en termes de formation et de qualité de soins pour pratiquer de cette discipline et revendiquer ce titre.
Cette branche d’activité n’était jusqu’ici pas réglementée et, comme la demande en termes de soins de santé mentale est en croissance exponentielle, cette matière est un champ de développement majeur des mouvements sectaires.
Hors cette loi, n’importe qui pouvait se revendiquer psychothérapeute. Quel danger !
Plusieurs émanations de sectes identifiées sont, par exemple, fort actives dans le domaine de la psychiatrie et de la psychothérapie.
Ce cadre légal, va être définitivement voté cette semaine. Il propose une reconnaissance des professionnels sérieux et dignes de confiance, et plus de lisibilité pour les patients qui s’adressent à eux.
J’ai également entamé la mise en ½uvre d’une loi vieille de 15 ans relative aux pratiques non conventionnelles.
L’objectif est de fixer à chaque fois des conditions pour la pratique de ses disciplines : homéopathie, ostéopathie, chiropraxie et acuponcture. Nous avons là aussi besoin d’une plus grande clarté et une meilleure protection du patient.
Mon objectif et je rejoins en cela les réflexions de l’Ordre des médecins lors d’un précédent colloque à ce sujet, n’est pas de consacrer une médecine « officielle » et de rejeter toute autre pratique. A côté de la médecine classique – qui n’est d’ailleurs pas une science exacte et qui ne cesse d’évoluer et de se remettre en cause-, il y a place pour des pratiques complémentaires, qui peuvent apporter un mieux-être au patient.
La loi permet de mieux lutter contre les pratiques qui se présentent comme des alternatives à la médecine classique, et dont les praticiens visent à ce que leurs « patients – victimes » sortent totalement des circuits traditionnels de soins, afin de les exclure et de mieux les assujettir.
Ces deux matières, Santé mentale et pratiques non-conventionnelles, ont notamment été identifiées dans le cadre des travaux de réflexion de la FECRIS, comme des champs d’action privilégiés des mouvements sectaires.
Par ailleurs, lorsque mes services ou moi-même sommes confrontés à des mouvements à tendance sectaire, comme cela a pu être le cas de la biologie totale, je donne systématiquement instruction aux administrations qui dépendent de mes compétences de dénoncer les agissements répréhensibles de professionnels de santé ou de personnes se revendiquant comme tels, aux autorités compétentes : Parquet, Ordres, Police, Bourgmestre, …
Ces instances font le plus souvent preuve de la plus grande diligence mais, faute de moyens d’action, doivent régulièrement faire aveu d’impuissance.
On s’aperçoit que dans un certain nombre de cas, les procédures initiées n’aboutissent pas ou peu, ce qui est inacceptable.
Mesdames et Messieurs, oui il reste beaucoup à faire et c’est une lutte qu’il faut mener à tout instant.
Les courants sectaires ne cessent d’évoluer, de changer de forme et, lorsque la route leur est barrée, de changer de champs d’activité, mais toujours avec le même schéma Approche-Séduction-Assujettissement et, au final, le même impact nuisible.
Je suis d’avis que, dans ce cadre, il est absolument nécessaire de mener une réflexion, au niveau national, pour arriver à une meilleure collaboration des différentes instances compétentes et à un renforcement de leurs moyens d’action, (administrations publiques, instances Ordinale, Instances judiciaires, Observatoires scientifiques, …)
C’est dans cette nécessité que s’inscrivait le colloque organisé l’année passée par le SPF Santé publique autour du développement des mouvements sectaires dans les soins de santé, qui donnera lieu à un plan d’action que j’espère pouvoir encore présenter sous cette législature.
Je suis également d’avis qu’il faut une meilleure coordination au niveau international, où certains mouvements sectaires ont pris une longueur d’avance en termes de présence au niveau des instances internationales, et de lobbying à ce niveau.
C’est dans cette nécessité que le colloque d’aujourd’hui trouve également toute sa place.
Et j’espère que de nouvelles initiatives seront proposées.
Merci déjà pour votre travail qui je sais difficile contre ces forces occultes qui menacent la santé et la dignité de trop nombreux de nos concitoyens.
Je vous remercie de votre attention.
Laurette Onkelinx
Les congrès de la FECRIS : Congrès à Londres le samedi 17 avril 2010
Perméabilité du Monde Contemporain Face aux Sectes Organisé par The Family survival trust Advice and support for the friends families of cult members et La FECRIS AVEC L’APPUI DU GOUVERNEMENT FRANÇAIS
Intervenants:
Tom Sackville, président de la FECRIS et du The Family Survival Trust (RU) :
Ouverture du colloque
Audrey Chaytor (RU) :
30 ans d’expérience d’aide aux familles traumatisées par l’embrigadement dans une secte. Historique de la lutte menée contre les dérives sectaires au Royaume Uni par l’association FAIR et The Family Survival Trust
Georges Fenech, Président de la MIVILUDES[1] (France) :
Promotion d’un programme européen de vigilance et de lutte contre les dérives Sectaires
Massoud Banisadre (RU) :
Sectes et terrorisme
André Frédéric, Député fédéral, Chambre des Représentants de Belgique, Président du groupe de travail chargé du suivi des recommandations de l’enquête parlementaire sur les sectes (Belgique) : Prise de conscience du phénomène en Belgique
Caterina Boschetti, journaliste et auteur, en coopération avec Maurizio Alessandrini, Président de la FA.VIS et Paolo Doppieri, réalisateur de Films (Italie) : L’évolution de la situation en Italie : du Livre Noir des Sectes italiennes au projet Nepenthes, un film au sujet des dérives sectaires pour éveiller la conscience des Gens
Tatiana Karpacheva (Russie), Professeur agrégé de philologie, Université pédagogique de la Ville de Moscou : L’infiltration de la Scientologie dans le système d’éducation russe
Philippe Dutilleul, journaliste à la RTBF[4] et Nathalie De Reuck[5], journaliste et écrivain (Belgique) : Comment ils ont réalisé un film (« Mort par prescription médicale ») d’investigation tout en menant l’enquête sur le décès de la mère de Nathalie après qu’elle ait refusé des soins médicaux suite à l’influence d’une pseudo-thérapie Témoignage de Nathalie « Ils ont tué ma mère »
Daniel PICOTIN, Avocat au Barreau de Bordeaux (France) Les difficultés juridiques d’une affaire internationale : du sud-ouest de la France à Oxford, un gourou français est arrêté en Suisse, alors que toute une famillesous son influence, recluse depuis 8 ans, croupit à Oxford, ruinée.
[1] Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, Paris[2] « Broyeurs de consciences : l’évolution des sectes en Belgique »,18 02 2010, éditions Luc Pire
[3] Il Libro Nero delle Sette in Italia, Caterina Boschetti, 2007, Newton Compton Ed. (5 edizioni)
[4] Radio Télévision belge francophone
[5] « On a tué ma mère », Editions Buchet-Chastel, 2010
CONGRES à PISE Le Samedi 12 Avril 2008 Organisé par : “La responsabilité de l’Etat pour la protection des citoyens face aux sectes destructives : analyses de modèles actuels et futurs possibles”
Modérateurs : Friedrich Griess, Président de la FECRIS (AT)
Danièle Muller-Tulli, Vice-présidente de la FECRIS (CH)
Mireille Degen, Secrétaire Générale de la FECRIS (BE)
Intervenants :Friedrich Griess, Président de la FECRIS (AT)
Bienvenue
Catherine Katz, Secrétaire Général de la MIVILUDES (FR)
Comment la France réagit face au front des sectes sur la scène institutionnelle européenne
Sergio Pollina, écrivain et expert (IT)
Le sectarisme contre la liberté : quelle défense possible ?
Emanuele Nacci, Droit constitutionnel, Université de Bari (IT)
L’abrogation de la loi italienne qui considérait la manipulation mentale (plagio) comme un crime : comment la liberté individuelle est-elle protégée ?
Initiatives – propositions – et considérations
Peter Pitzinger, (AT) – Office Consultatif sur les Sectes – gouvernement régional de Basse-Autriche
L’observation des groupes religieux par l’Etat et la liberté religieuse – présentation du modèle autrichien
André Frédéric, membre de la Chambre des représentants et président du Groupe de travail chargé du suivi des recommandations de la Commission d’enquête parlementaire visant à élaborer une politique en vue de lutter contre les pratiques illégales des sectes (BE)
État des lieux de la situation sectaire en Belgique : réponse apportée par les pouvoirs publics
Barbro Westerholm, Membre du Parlement suédois, (SE)
Ce que fait la société suédoise pour protéger les personnes des groupes sectaires
Maciej Szostak, Université de Wrocław, Pologne (PL)
Les mouvement sectaires nuisibles en Pologne après 1989 – problèmes de droit et de science médico-légale se rapportant au sujet principal de la conférence
John Allan, Chercheur, (RU)
Ce que les Brahma Kumari ne veulent pas que les Nations Unies sachent ; comment Shiv, l’armée de Shakti, cherche à conquérir le monde,
Pamela Lichtenwalner (USA)
La Scientologie dans l’Instruction Publique aux Etats-Unis
Claude Delpech – AFSI (FR)
Alerte ! Faux Souvenirs Induits
Lorita Tinelli – CeSAP (IT)
Arkeon : Un cas exemplaire de « psycho-secte » typique en Italie
Rod Dubrow-Marshall (UK)
Comment identifier les sectes dangereuses, leurs chefs et le mal qu’ils commettent – comment les développements scientifiques de recherches devraient informer les gouvernements, les politiques et la loi
Jean-Yves Radigois (FR)
Ancien directeur de l’action sociale de la ville de Pontivy (Morbihan)
L’enfant au sein de mouvements à dérives sectaires : contribution à une modélisation d’intervention des Pouvoirs publiques.
Branka Dujmic-Delcourt (HR)
Le chemin qui a abouti à la création d’une association en Croatie : CISK (Centre pour l’information sur les sectes)
Voir le compte-rendu du Congrès sur le site de la FECRIS : www.fecris.org
Ci-dessous allocution de Madame :
Catherine KATZ
Secrétaire Générale de la MIVILUDES[1] (FR)
COMMENT LA FRANCE REAGIT FACE AU FRONT DES SECTES SUR LA SCENE INSTITUTIONNELLE EUROPEENNE
Depuis de très nombreuses années la MIVILUDES et auparavant la MILS participent à cette conférence de la FECRIS et avec très grand plaisir. Je viens d’entendre les deux précédents intervenants qui démontrent que la France n’a pas une position isolée sur la scène internationale.
Vous avez entendu Monsieur Alessandrini : en Italie et en Belgique les choses évoluent. Pour avoir discuté avec Madame Caberta, en Allemagne aussi les choses bougent. La France n’est absolument pas seule sur le plan international lorsqu’elle met en place une politique de lutte contre les dérives sectaires. Il faut rappeler que nous sommes tous membres de pays démocratiques où chacun a le droit d’avoir une conviction, même si elle pourrait être qualifiée par certains d‘étrange. Ce sont les dérives sectaires qui font l’objet de la vigilance et de la lutte de l’Etat français.
Pourquoi ? Parce que ce sont les victimes qu’il convient de protéger. C’est aux victimes que l’on porte atteinte en malmenant leur liberté individuelle. La liberté d’aller et de venir, la liberté de choix, sans aucune emprise mentale et c’est donc, dans ce sens, que la politique de la France s’est mise en place déjà depuis 25 ans. Je vous rappelle, pour information, que le premier rapport parlementaire date de 1983 : c’est le Rapport Vivien qui avait fait le constat des dégâts extraordinaires des mouvements sectaires sur les victimes. Il y a eu ensuite trois rapports de commissions d’enquête parlementaires en 1995, en 1999 et en 2006 et nous parlons actuellement d’une 4ème commission d’enquête qui pourrait porter sur le domaine de la santé. Je rappelle, s’il en est besoin, que les parlementaires français sont élus démocratiquement.
La commission d’enquête de 1995, « Les sectes en France » avait pour but de faire une photographie de la situation des mouvements sectaires en France et avait alors listé 172 mouvements. Je reviendrai un peu plus tard sur le fait que cette liste a posé problème au plan international, notamment et a amené certains pays à stigmatiser la France comme attentatoire aux libertés de conscience. J’expliquerai pourquoi tel n’est pas le cas.
En 1999, dans le rapport « Les Sectes et l’argent » les parlementaires ont constaté que le but des mouvements sectaires, après l’emprise mentale, était d’obtenir de l’argent des adeptes, de s’enrichir. Comment ? Par un prosélytisme exacerbé, également par un entrisme dans les milieux institutionnels et économiques (et je suis contente que Monsieur Alessandrini ait mis l’accent sur cet aspect également). La formation professionnelle mobilise les mouvements sectaires. Les parlementaires l’ont constaté en 1999 et sur le terrain, nous le constatons également plus que jamais.
En 2006 une troisième commission d’enquête parlementaire a porté sur l’enfance. C’est un sujet qui me tient terriblement à coeur. Il y a la Convention internationale des droits de l’enfantsignée par touts les pays d’Europe. Cette convention internationale prévoit que l’enfant a des droits. Ces droits passent par une socialisation, par l’accession à la connaissance et par l’ouverture que l’enfant doit avoir pour devenir un jour un citoyen libre et s’insérer dans la société. Cette convention des droits de l’enfant n’est pas appliquée dans les mouvements sectaires. Elle est même totalement violée dans ces mouvements. Les parlementaires ont indiqué les cas où les enfants étaient victimes et ont fait 50 propositions pour que la situation s’améliore et je dois vous dire le rapport de la MIVILUDES de 2007 est pour une partie consacré à la mise en œuvre de ces 50 propositions avec le constat que les 2/3 des propositions ont été suivies d’effet. Le sort des enfants dans les mouvements sectaires est l’affaire de tous.
Enfin, peut être, bientôt une Commission d’enquête parlementaire sur le domaine de la santé serait extrêmement importante car les dégâts dans ce domaine sont extrêmement dramatiques, jusqu’à entraîner la mort.
Après ces constats des parlementaires, les gouvernements successifs ont réagi par la création d’organismes de lutte : je passerai rapidement sur l’observatoire sur les sectes qui a précédé la mise en place de la MILS (Mission interministérielle de lutte contre les sectes). Au plan international où les lobbys pros-sectaires savent se faire entendre, la France a été très stigmatisée du fait de cette création. En réalité cette mission travaillait sur les dérives sectaires car ce qui importe ce sont les comportements qui ne respectent pas les lois et les règlements ou qui troublent l’ordre public et tout cela dans un contexte d’emprise mentale. Je dois mettre l’accent quelques instants sur l’emprise mentale, vous en avez parlé, Monsieur Alessandrini et, effectivement, en tant que magistrat c’est vraiment quelque chose qui me choque ; c’est le fait que finalement un individu ou des groupes d’individus mettent un autre individu sous emprise pour l ‘ amener à faire des choses qui lui sont préjudiciables. C’est un comportement qui fait perdre à tout individu sa liberté, sa liberté d’action, sa liberté de choix : Après tout, si librement vous décidez de vendre tous vos biens et les donner à votre voisin ou votre voisine, c’est votre droit. Si par contre, sous emprise, et sous la domination d’un individu, vous privez toute votre famille de tous ses biens, vous n’avez pas le choix de le faire ou de ne pas le faire, vous êtes déjà englué dans la volonté d’un autre. C’est contre ça que la Mission interministérielle, dont je suis la secrétaire générale depuis trois ans, est chargée de lutter.
Alors, dans « Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires », chaque terme du mot a son importance. « Interministérielle » ça veut dire qu’on travaille avec tous les ministères parce que les dérives sectaires ne concernent pas qu’un seul secteur : l’ Education nationale, le ministère de la Santé, le ministère de l’ Intérieur et la Défense en France pour les gendarmes, enfin la Justice à laquelle j’appartiens, sont concernés par ce phénomène ; la justice a une place stratégique , tout particulièrement puisque au bout du compte c’est elle qui rend les décisions judiciaires , qui sanctionne les dérives. Tous ces ministères doivent travailler ensemble ; c’est l’absence de circulation des informations qui handicape la lutte contre les dérives sectaires.
La Mission met en œuvre deux axes « la vigilance et la lutte » : la prévention, la répression. La répression : que l’on sanctionne les comportements pénalement sanctionnés ou pénalement non-respectueux des lois des mouvements sectaires c’est une chose et c’est normal. Aucun pays ne se dispense de sanctionner les comportements illégaux y compris d’ailleurs des pays qui seraient plus libéraux que la France très critiques à notre égard. Je rappellerai juste ce qui vient de se passer au Texas,[2] il y a quelques jours. Là il y a un disfonctionnement et non-respect des lois et là il y a réaction de la police, de la gendarmerie, de la justice qui est parfaitement légitime.
Cette lutte est essentielle mais n’est pas suffisante. Il faut informer le citoyen et former les agents publics – c’est extrêmement important – c’est même fondamental. C’est sur ce point que s’élèvent les critiques parce qu’on vous dit « mais vous portez des accusations sans preuves. » Est-ce que la victime n’existe que parce qu’il y a eu condamnation pénale ? En tant que ancien juge d’instruction, je sais bien que c’est faux. La victime existe bien avant. Elle peut ne pas pouvoir prouver ce qu’elle dit, les faits peuvent être prescrits mais la victime a le droit de ne pas agir en justice si elle n’a plus envie de parler de ce qu’elle a subi c’est un droit qu’on doit lui reconnaître. Est ce que pour autant ça lui enlève le statut de victime ? Pas du tout. Doit-on dire aux victimes de l’ Ordre du Temple Solaire et à leur famille, qu’elles ne sont pas des victimes depuis qu’une relaxe a été prononcée par les juridictions ? Je ne me vois pas le faire.
Il est important d’être vigilants, d’informer les gens, le public en général, mais aussi d’informer les services qui sont chargés de faire l’enquête. C’est en ce sens que la position française est originale parce qu’elle met l’accent partout où il y a des risques de dérives. Je ne vous cache pas, que malgré tout il y a encore beaucoup de travail à faire parce que c’est très difficile de faire comprendre, qu’un individu n’est pas libre en réalité. De plus, c’est un domaine où l’on transfère beaucoup de ses convictions personnelles. J’avoue, de façon tout-à-fait honnête, que quand je suis arrivée à la MIVILUDES, j’avais le sentiment que, pour ma part, je pourrais ne pas être victime d’une dérive sectaire. Je me disais « j’ai mauvais caractère, j’ai une certaine personnalité et je crois que j’ai un minimum de culture et d’intelligence » et donc je me sentais exclue du risque. Et je sais aujourd’hui que je me trompais, par ce que j’ai rencontré des gens de très haut niveau intellectuel avec de très hauts diplômes, avec une personnalité très forte, qui ont été des années dans un mouvement sectaire. L’emprise n’a rien à voir avec l’intelligence, avec la personnalité ; il suffit d’être attiré à un moment donné par un discours séducteur. Les associations, la MIVILUDES mettent l’accent sur les mauvais aspects, les dérives. Et c’est une réalité que je ne conteste pas du tout. Mais pour le futur adepte qui est séduit, ce n’est que de l’amour qu’on lui donne, avec des promesses de bonheur, d’amour, de succès (vous êtes mal considéré dans la vie de tous les jours). « On va vous donner de quoi être au top de vos capacités ! » et ensuite l’adepte est sous emprise et ne peut pas réagir ; il est englué. Et donc c’est très dur à comprendre cet aspect là pour des enquêteurs, pour des magistrats. L’information permet de comprendre et donc d’être vigilants et permet aussi éventuellement d’éviter des dérives sectaires.
Notre Mission se doit d’informer le Premier Ministre par un Rapport Annuel. Sur ce qui est le plus nouveau ou ce qui prend de l’ampleur : on ne fait pas un rapport en reprenant en copié-collé ce qui s’est passé l’année d’avant en le développant. Je pense que certains mouvements sectaires aimeraient que ça se passe comme cela, qu’on fasse une espèce de rapport un peu répétitif ou finalement on rajouterait juste ce qui s’est passé l’année suivante. Et bien non. Nous, ce que nous faisons c’est une analyse des données qui nous sont communiquées de la base jusqu’au sommet par l’ensemble des Ministères et les services décentralisés. Il y a un maillage très serré sur le territoire avec les départements, un maillage qui est effectué par les forces de police, de gendarmerie, et qui nous font remonter les informations. Ces informations sont toutes analysées pour le compte du Premier Ministre. Ce document fait l’objet de conférences de presse et je remercie aujourd’hui d’ailleurs très officiellement notre attachée de presse qui a fait un travail remarquable de communication en direction du public et des personnes qui potentiellement peuvent être victimes. Dans notre rapport, cette année, nous abordons le problème des faux souvenirs induits. Ce problème, très difficile aussi à appréhender, va permettre je l’espère aux victimes lorsqu’elles vont se présenter devant un juge d’instruction qui ne connaîtrait pas le problème de dire : « attention, il y a un service du Premier Ministre qui a parlé de ce problème. Peut être vous n’allez pas croire que dans mon dossier ça existe mais il faut que vous sachiez que ça existe en réalité puisque l’analyse en a été faite ». C’est l’intérêt de ces rapports d’être utilisés dans le cadre de procédures et des enquêtes. J’indique que sur un dossier en particulier, l’an dernier, le document que nous avions fait sur l’emprise mentale dans le Rapport 2006 a été utilisé par les enquêteurs pour permettre au juge de mettre en examen , puis en détention provisoire une gourelle ( un leader femme d’un mouvement ). Les avocats nous ont dit qu’ils avaient vu le Rapport dans le dossier du juge d’instruction.
Alors on nous reproche de ne pas être des universitaires, de ne pas avoir un esprit de chercheur. Je ne vous cache pas qu ‘à la Mission, il y a des acteurs de terrain qui sont habitués à réagir par rapport aux victimes. Concrètement, les policiers, les gendarmes, les magistrats, les acteurs sociaux agissent et ensuite analysent ces réactions dans l’intérêt encore une fois des victimes car notre existence à la MIVILUDES n’est légitimée que par l’existence des victimes dont vous êtes les représentants aujourd’hui au sein de ce colloque.
Actuellement avec le ministère de la santé, nous sommes en train de réfléchir à mettre en place une évaluation des méthodes thérapeutiques déviantes sectaires qui sont utilisées par de nombreux charlatans de la santé.
Mon rôle ici n’est pas de donner des leçons. La France a un système qui correspond à son histoire, à son évolution. Finalement quelle que soit la prise en charge des victimes, à partir du moment où elle est faite, elle est valable. La France est un Etat laïque, donc elle a mis en place des institutions qui ne sont peut-être pas transposables dans touts les pays. Ce qui est important, c’est de trouver peut-être au plan européen une espèce de facteur minimum de convergence qui nous permette de travailler en commun, ce qui n’enlève rien au fait que chacun des savoir-faire proposés par chacun des pays est tout-à-fait valable. Ne prenez pas mes propos comme l’envie de vous imposer un modèle.
Il n’y a pas de définition juridique de la secte en France. C’est une petite problématique, souvent soulevée par des mouvements sectaires ou leurs supports médiatiques , mais qui n’est qu’apparente. Pourquoi pas de définition juridique ? A la différence de la Belgique où il y a la définition juridique d’une » secte nuisible « . Et bien, parce que les parlementaires français et l’ensemble des institutions travaillant sur le sujet, notamment l’observatoire sur les sectes, ont considéré que :
Dans un Etat laïque, définir ce qui est une secte c’était limiter potentiellement la liberté de conscience
Parce que cela limite dangereusement le terme. Les mouvements à caractère sectaires ayant une forte capacité d’adaptation, chercheraient à échapper à cette définition précise.
J’aborde maintenant ce qui pourrait être possible en matière d’échanges européens.
Dire qu’il n’y a pas de définition du mot secte, c’est dire qu’ il n’y a pas de victimes ? Non. La Cour européenne des droits de l’Homme n’a pas non plus donné de définition juridique de ce qu’est une secte et néanmoins elle prend ses décisions dans ce domaine tout comme les juridictions françaises. En France, un certain nombre de risques sectaires ont été détectés. L’emprise mentale est le premier de ces risques dans les problématiques de dérives sectaires.
Il existe toujours une emprise mentale préalable à la commission d’une infraction, ou à l’existence d’une problématique familiale dans le cadre d’un divorce ou au non respect du droit du travail. Systématiquement l’individu est placé en état de sujétion, sous l’emprise du mouvement ou du leader du mouvement.
Ensuite surviennent les ruptures familiales et nombreux d’entre vous ici l’ont vécu. Ces adeptes, leur famille voit dans leur regard qu’ils sont partis ailleurs. Ils abandonnent leurs proches pratiquement du jour au lendemain sans avertissement. C’est très impressionnant d’entendre des victimes raconter ces situations. C’est extrêmement émouvant aussi parce qu’on voit des familles éclatées, des vies brisées, uniquement du fait d’un homme ou d’un homme et d’un mouvement.
Et puis il y a surtout les exigences financières. Les victimes sont parfois ruinées. Leur vie entière et celle de leurs proches sont complètement brisées.
Voilà donc de façon schématique la conception de la France. Il y a de nombreux autres critères de détection du risque sectaire mais ceux là sont les principaux.
Alors ce « modèle », cette façon de voir les choses est-elle exportable ? Que faisons-nous à ce niveau-là ?
Depuis de nombreuses années, la MILS, puis la MIVILUDES ont vraiment voulu faire comprendre aux autres pays européens notamment, qu’ils n’étaient pas, contrairement à ce qu’affirmaient les mouvements sectaires et leurs amis, attentatoires aux libertés de conscience et de conviction. Il existe en France des mouvements qui respectent la règle du jeu, ceux-là ne posent aucun problème, sectaires ou pas. Reste que la présence de l’emprise mentale dans toute structure pousse à la vigilance. Aujourd’hui il peut bien ne rien se passer et demain nous pouvons avoir de nouvelles victimes, donc c’est un élément à prendre en compte.
Alors qu’est ce qui est reproché à la France ? Commençons par là. Il a été reproché à la France la liste de 172 mouvements. Alors, soyons clairs, cette liste n’est plus utilisée par les services de l’Etat parce qu’elle est dépassée, (elle date de 1995). La MIVILUDES travaille sur les comportements.
Ensuite il y eut une remise en cause de la MILS (Mission Interministérielle de Lutte contre les Sectes) mais la MILS faisait exactement ce que la MIVILUDES fait aujourd’hui, c’est-à-dire lutter contre les comportements : là encore cette critique n’a aucun intérêt.
Et puis, on critique la Loi About-Picard ! Or, cette Loi About-Picard permet de retenir une incrimination quand les adeptes sont placés en état de sujétion donc sous emprise mentale. Le terme « mise en état de sujétion »a été préféré à celui de manipulation mentale. C’est une infraction difficile à prouver. Je ne vais pas rentrer dans les détails, mais prouver l’influence psychique d’un individu sur un autre ce n’est pas facile. Heureusement il arrive que certains leaders de mouvements sont tellement contents de l’emprise qu’ils exercent et ont tellement de jouissance à mettre les autres sous emprise qu’ils se filment. Des condamnations ont pu être prononcées parce que la preuve elle était sur pellicule.
Cette loi, est critiquée mais elle a été validée à tous les stades. Elle a été validée par le Conseil constitutionnel en France, elle a été validée par les instances européennes qui ont dit qu’il était tout à fait légitime qu’un Etat cherche à se protéger pénalement d’un comportement dérivant qui consiste à mettre un individus sous emprise et lui faire ruiner sa vie. Les mouvements sectaires disent que ce n’est pas bien. Certains Etats, notamment anglo-saxons, s’en inquiètent. Mais c’est une loi qui est extrêmement utile, qui est d’ailleurs utilisée pour bien d’autres infractions que les infractions liées au domaine sectaire et c’est quelque chose d’important. Alors, cette position il faut l’expliquer et c’est ce que nous nous efforçons de faire depuis trois ans, avec le Préfet Roulet, et tous les conseillers de la MIVILUDES. Nous allons régulièrement à la rencontre d’Etats qui nous sollicitent pour leur présenter notre façon de travailler. Beaucoup de pays d’Europe centrale, nous ont sollicités. Ils sont très intéressés par notre façon de fonctionner. Nous allons également à la rencontre des institutions européennes. Juste un petit mot sur les institutions européennes. Les mouvements sectaires ont parfaitement compris, que le combat ne se menait pas seulement dans les pays mais a u niveau des institutions européennes. Je tiens à souligner le plaisir que l’an dernier, la FECRIS était présente à la réunion du BIDDH[3] à l’OSCE à Varsovie. Cela a été apprécié de tous. Nous avons eu les échos de notre ambassadeur, les échos de M. Strohal le directeur du BIDDH , : tous ont été heureux que la FECRIS soit intervenue et qu’on ait entendu la voix des victimes et non celles des mouvements sectaires qui viennent dire combien les Etats comme l’Allemagne, comme la Belgique, comme la France, comme l’Autriche, comme la Pologne sont totalitaires.
Il y a les associations qui viennent exprimer la souffrance des victimes des dérives sectaires et qui ont pu le faire aussi à Strasbourg, au Conseil de l’Europe, grâce à Mme Oeschger et à Mme Muller-Tulli. Vraiment, il est important que vous communiquiez, il est important que nous communiquions au plan européen.
Alors, les relations de la MIVILUDES avec les associations Internationales et notamment avec la FECRIS sont indispensables. Il faut savoir que depuis trois ans que je suis à ce poste, je viens à cette manifestation. Donc n’hésitez pas, nous sommes 4 personnes de la MIVILUDES présentes. Il y a la responsable de la santé, il y a une personne également qui s’occupe des relations avec les enquêteurs (police et gendarmes), il y a enfin la personne chargée de relations avec le parlement. Donc n’hésitez pas à me solliciter pour vous mettre en contact avec ces personnes, si vous souhaitez avoir des informations.
Maintenant, c’est bien de faire connaître la position de la France, c’est bien de faire connaître la position de la FECRIS, c’est bien de communiquer sur la légitimité de notre action mais est-ce qu’on peut aller plus loin ? Est-ce que on peut imaginer un modèle commun en Europe et un point minimum de convergence ?
J’ai tendance à penser que ça ne pourra se faire que sur des actions et des aspects techniques, comme la problématique des mineurs par exemple. Je suis encore une fois très attachée à la protection des plus faibles et la protection des mineurs est un sujet commun à tous et qui peut être un point d’entrée. Quel pays peut accepter que ses mineurs soient broyés, détruits, violés, abusés ? Autre point d’entrée possible : la santé. Une évaluation des méthodes déviantes qu’elles soient sectaires ou non, peut permettre de trouver un terrain commun.
Et pourquoi pas un observatoire européen dans le domaine des dérives sectaires ?
Alors, pour ma part, Il y a deux façons de concevoir un observatoire : le centre de documentation belge CIAOSN[4] et puis d’autres pays qui ont un centre d’observation plus universitaire…
La vision française donne sa préférence à une approche concrète, fondée sur la réalité et la prise en compte des victimes et c’est ça qui nous importe. Après, chaque pays peut avoir un avis différent, et bien sûr c’est un peu provocateur, comme vision, mais je vous la soumets pour réflexion.
Et puis point important, et consécutif au précédent : l’importance d’une coopération policière et judiciaire. Je crois qu’il faut qu’au plan international les services de police et de justice échangent. Les mouvements sectaires ne connaissent pas les frontières. Pour échapper aux sanctions nationales ils passent la frontière, d’une frontière à l’autre à une rapidité incroyable : les flux financiers aussi passent les frontières pour échapper évidemment aux sanctions fiscales.
Et enfin, au plan législatif. Il y a notre loi About Picard, et en tant que Magistrat je trouve qu’elle a une grande utilité parce qu’elle permet de reconnaître cette notion d’emprise mentale et donc la victime des dérives sectaires. S’il pouvait y avoir au plan européen un travail qui permette aux différents parlementaires des pays, d’envisager de s’inspirer de cette loi, le sort des victimes en serait facilité. Je vous ai entendu Monsieur Alessandrini sur l’Italie : vraiment c’est une loi qui est un recours pour les victimes et pour les magistrats qui permet de prononcer des sanctions de comportements à la fois des groupes et des individus.
Alors pour finir pourquoi s’arrêter à l’Europe ? Faire comprendre aux pays Anglo-Saxons que notre démarche n’est pas pas attentatoire aux libertés de religion et que l’enjeu est la protection et la défense des victimes de ceux qui bafouent les droits de l’homme. Nous nous y sommes employés récemment avec le Québec (notre langue commune facilitant les échanges), mais je suis sûre que ce devrait être possible, et avec les Etats-Unis et avec d’autres pays qui semblent moins réceptifs à nos façons de voir.
Je vous remercie de votre patience et de m’avoir écoutée.
[1] Mission Interministérielle de VIgilance et de LUtte contre les DErives Sectaires[2] Le 3 avril 2008 les autorités Texanes (Service de Protection de l’enfance) ont menée une descente sur le YFZ Ranch, (Eldorado dans Schleicher County), propriété d’un groupe dissident Mormon, fondamentaliste et polygame, suite à une plainte pour abus sexuels. En un premier temps ils ont emmené 137 enfants et 46 femmes.[3] Bureau des institutions démocratiques et des droits de l ‘homme de l’OSCE[4] Centre d’Information et d’Avis sur les Organisations Sectaires Nuisibles